L’Espace de l’Art Concret est doté d’une collection d’art abstrait, unique en France, la Donation Albers-Honegger. C’est autour et dans un château du XVIe siècle que l’on peut explorer les multiples tendances de l’abstraction géométrique grâce à deux collectionneurs passionnés. Découvrons comment ce projet culturel, artistique et éducatif s’est développé.
Dans un vaste jardin de 3 hectares confié à l’architecte paysagiste Gille Clément, l’espace de l’Art Concret (EAC). se déploie sur trois bâtiments : les expositions temporaires au premier étage du château de la famille de Grasse, la collection permanente dans un bâtiment contemporain d’un vert pistache qui détonne dans le paysage (architectes Annette Gigon et Mike Guyer) et en contrebas de l’esplanade du château, un autre édifice (architecte Marc Barani) qui accueille les ateliers pédagogiques.
C’est en 1989 que la ville de Mouans-Sartoux a acquis le château pour en faire un lieu culturel. L’artiste zurichois Gottfried Honegger proposa alors à la municipalité d’en faire un centre d’art autour d’une collection privée unique au monde et mise à disposition du lieu. En 1990, l’eac. était né, investi d’une mission éducative pour promouvoir l’art contemporain et plus spécifiquement l’art concret.
« L’art concret prend forme avec l’aide de la couleur, de l’espace, de la lumière, du mouvement. C’est ainsi qu’il se concrétise. » Manifeste de l’Art concret groupe fondé en 1930.
Gottfried Honegger et sa femme Sybil Albers ont constitué une immense collection et fait le pari avec l’eac., de placer l’art au cœur de la vie. Le choix du nom « espace » révèle la volonté de mettre l’éducation du regard et l’ouverture au plus grand nombre au centre de ses missions.
C’est ainsi qu’en 1998, un lieu dédié à l’accueil des jeunes venus de tous horizons s’est ouvert pour des ateliers pédagogiques. Jusqu’en 2000, ils ont donc permis au public d’accéder à leur collection au premier étage du château puis on fait le choix de la donner à l’Etat français.
D’autres artistes (Aurélie Némours, Bernar Venet, Laurent Saksik …) ont également fait une donation et ce sont aujourd’hui 621 œuvres qui sont abrités dans un nouveau bâtiment construit pour l’occasion.
Trois espaces donc et trois missions complémentaires : conservation et valorisation de la collection Albers-Honeger, recherche autour d’expos temporaires, éducation et sensibilisation à l’art d’aujourd’hui pour la jeunesse.
« Pour nous, c’est un lieu de rencontre, un lieu de discussion (…). Nous voulons inviter un monde aujourd’hui passif, muet, résigné, à devenir actif, responsable et créatif. »
Si le cœur de la collection s’est construit autour des grands noms de l’art concret suisse (Max Bill, Richard-Paul Lohse, Camille Graeser, Gottfried Honegger) et français (Bernard Aubertin, Jean-François Dubreuil, François Morellet, Aurélie Nemours), elle est aussi composée d’œuvres abstraites européennes depuis 1900 (Augusto Giacometti, Georges Vantongerloo, Sonia Delaunay, Frantisek Kupka). Les principaux acteurs du minimalisme et de l’art conceptuel sont représentés dans le fonds permanent (Joseph Beuys, Daniel Buren, Alan Charlton, Richard Long …) mais on trouve également la présence d’artistes liés à l’Arte Povera (Manzoni), au mouvement support-surface (Claude Viallat) ou encore au Nouveau Réalisme (Tinguely) qui témoignent de l’esprit visionnaire des deux collectionneurs.
En 2008, l’EAC. a reçu le « Prix européen du projet culturel » par la Fondation Européenne de la Culture « Pro Europa », pour l’inscription européenne de son projet ainsi que son engagement en faveur de l’éducation artistique et en 2020, le « Label Centre d’Art Contemporain d’Intérêt National » du Ministère de la Culture.
Petit plus : L’eac. propose une fois par mois des visites en francais/anglais (« Practice your english « ) et tous les jours d’ouverture des « Visites Flash » autour d’une œuvre, de l’architecture, d’un artiste, d’une salle d’exposition.
Par Anne Emellina (texte et photos)