À quelques encablures du golfe de Saint-Tropez, Grimaud et Port Grimaud forment un duo singulier et harmonieux : l’un, village médiéval pétri d’histoire, l’autre, cité lacustre visionnaire et solaire. Deux visages d’une même Provence, entre pierres ancestrales et reflets d’eau, héritage et audace.
Grimaud, l’âme médiévale et culturelle de la Provence
Perché sur les hauteurs, Grimaud déploie ses ruelles de pierre, ses passages voûtés et ses façades pastel baignées de lumière. Dominant le village, les ruines du château féodal, datant du XIᵉ siècle, rappellent la puissance des seigneurs de jadis.
Restauré avec soin, le site offre aujourd’hui un panorama exceptionnel sur le golfe de Saint-Tropez et accueille des concerts en plein air l’été, où les mélodies se mêlent au souffle du vent.
Non loin de là, le Moulin Saint-Roch, restauré dans les années 1990, tourne encore parfois au gré du vent. Il témoigne du passé agricole du territoire et se visite comme un clin d’œil à la vie rurale d’autrefois. En contrebas, le Pont des Fées, vestige d’un aqueduc médiéval, relie les rives du vallon dans une atmosphère quasi mystique, comme suspendu entre nature et légende.
Faire dialoguer l’héritage avec le présent
Mais Grimaud ne se contente pas de son héritage : il l’anime, le questionne. La Maison des Arcades, magnifique demeure du XVIᵉ siècle, accueille des expositions et des événements culturels tout au long de l’année. Le Musée du Patrimoine restitue avec émotion les gestes, outils et savoir-faire d’autrefois.
Le Kilal, installé dans l’ancien Hôtel de la Poste, se transforme en galerie éphémère pour le festival de street art.
Dans une bâtisse templière, la Galerie A défend l’art contemporain dans toutes ses expressions à travers le duo d’artistes formée par Audrey Gauthier et Charles Serruya dont les sculptures sur fil habillent avec grâce les arcades.
Sur la place de l’église, le Studio Paon complète cette cartographie artistique avec ses collections de haute volée (Damien Hirst, Alex Katz ou Stefan Szczesny,etc)
Chaque été, le festival Grimaud Art Urbain fait dialoguer passé et modernité : les façades du village deviennent toiles pour les artistes de street art, transformant la pierre séculaire en support d’expression contemporaine.
À Grimaud, l’histoire n’est pas figée, elle s’écrit encore — entre patrimoine, culture et imagination.
Port Grimaud, la cité lacustre et avant-gardiste
En contrebas, à quelques minutes à peine, s’étend Port Grimaud, l’un des projets architecturaux les plus audacieux du XXᵉ siècle.
Née du rêve de l’architecte François Spoerry dans les années 1960, la cité lacustre a fait de la mer une artère, des canaux des ruelles, et des barques ses véhicules.
Inspiré par les villages de pêcheurs provençaux, Spoerry imagine un urbanisme à taille humaine, fondé sur la douceur, la circulation de l’eau et la lumière.
Classée Architecture contemporaine remarquable, Port Grimaud est aujourd’hui un modèle de cité maritime intégrée à son environnement. Chaque maison, peinte dans des tons chauds — ocre, corail, sable, bleu pastel — possède son embarcadère privé. Les ponts et placettes créent des perspectives intimes, et la vie s’écoule ici au rythme des marées et du café du matin.
Au centre du plan, l’église Saint-François d’Assise, achevée en 1973, illustre cette vision d’un art total : lignes sobres, lumière méditerranéenne filtrée par les vitraux géométriques d’Yvaral (le fils de Victor Vasarely). Du clocher, la vue embrasse l’ensemble du port, révélant toute la beauté de cette Venise provençale née de l’imaginaire d’un seul homme.
Aujourd’hui encore, Port Grimaud reste un laboratoire d’harmonie entre architecture, écologie et art de vivre. Les visiteurs y flânent au fil des canaux, les habitants cultivent une forme rare de douceur partagée, et le lieu conserve cette aura d’utopie réussie, suspendue entre la mer et le ciel.
Par Eric Foucher / texte et photos
PS// Merci à nos guides Audrey & Charles pour la merveilleuse balade en pointu (Galerie A.)
