Lionel Kazan a capturé sur papier l’air du temps, mettant en valeur les robes de haute couture comme du prêt-à-porter naissant. Avec ses clichés, il nous offre un témoignage sur la société des années 50 et 60 à travers l'évolution des silhouettes féminines, les changements de mode et les icônes de l’époque.
La comédienne Alexandra Kazan est à l’initiative de l’exposition qui met en lumière le travail de son père, le photographe Lionel Kazan. Elle a réuni des documents qui retracent sa carrière et embrasse deux décennies d’un travail magnifique, une œuvre photographique souvent méconnue.
D’origine russe, de grands-parents qui ont fui la révolution, Lionel naîtra à Monaco en 1930 et sera très fier de sa nationalité monégasque qui lèvera son statut d’apatride. Mais c’est en France qu’il se fera connaître après sa formation à l’école Louis Lumière à Paris. En 1950, il intègre le Studio Astorg afin de façonner l’image du magazine Elle qui publiera plus d’une centaine de couvertures signées Kazan et des milliers de pages de mode. Il travaillera également pour Nouveau Femina, Marie-Claire, Vogue, Glamour, Harper’s Bazaar.
Lionel Kazan a sublimé la beauté des femmes dans le monde entier auprès des plus grands noms de la mode et mis en scène vêtements, mannequins et environnement en s’éloignant des images figées habituelles.
Le photographe a été témoin de l’évolution de la condition féminine et des changements de mode. Le corps qui se libère et l’émancipation vestimentaire correspondent à une transformation sociétale, celle des mœurs et du métier de photographe et des plateaux qui se déplacent de la ville à la campagne, de Paris à New York en passant par la Grèce ou le Portugal.
De la stylisation de la femme, on passe à sa libération exprimée notamment par le mouvement et l’instantanéité fixés par Lionel Kazan.
L’exposition nous permet de découvrir les créations de grands couturiers et les lancements de mode (le New-Look de Christian Dior, le smoking d’Yves Saint Laurent, le scandaleux bikini …), des mannequins comme Bettina Graziani, Suzy Parker ou Pia Rossili que Lionel Kazan épousa et les personnages qui ont croisé la route de ce dernier (Marc Allegret qui lui offrit son premier appareil photo à 12 ans, Hélène Lazareff fondatrice de Elle, le photographe Gilles Bensimon, le publicitaire Jean Feldman …).
Au-delà d’une immersion dans un univers de beauté et d’élégance dans le monde de la mode, l’exposition nous permet de rencontrer un portraitiste de grandes vedettes de ces années-là.
Il fut un des premiers à photographier Brigitte Bardot alors mannequin pour Elle, il immortalisa Catherine Deneuve à ses débuts et sa sœur Françoise Dorléac, Ingrid Bergman, Roger Vadim, Jane Fonda, François Perrier, Jean Seberg … Le grand écran mais aussi le monde des arts de l’écrivain Romain Gary au peintre Pierre Dmitrienko.
Lionel Kazan a fixé pour nous l’air du temps en laissant également les traces des folles nuits chez Régine. Dans une pièce du Musée de la Photographie transformée en boîte de nuit avec boule à facettes et stroboscopes, un diaporama des clichés de « La folle nuit de Saint-Laurent chez Régine » pour le mensuel Marie-Claire en septembre 1966 est projeté. Témoignage des nuits parisiennes mais aussi d’une libération de la femme grâce à cette collection Saint-Laurent présentée ce soir-là, robes miroir, robes gitanes et surtout le fameux tailleur-pantalon impensable à l’époque en haute-couture.
Le petit plus : Cette exposition fait suite au travail de recherche d’Alexandra Kazan sur l’œuvre de son père qu’elle a présenté dans un livre-hommage Lionel Kazan photographe, raconté par sa fille en vente au Musée.
Par Anne Emellina (texte et photos)