En quelques années, Pierre Altobelli a hissé le bistrot familial - ouvert par sa grand-mère Davia en 1953 - au rang d’institution. Sa cuisine de terroir, authentique et de saison - barbajuan, daube, terrine de lapin - met en lumière les bons petits plats niçois trop souvent oubliés. La tradition réinventée !
C’est un bistrot niçois à l’allure d’osteria italienne. Le genre d’auberge tradi’ toujours pleine à craquer où l’on se régale de bons petits plats aux saveurs d’ici.
Ce restaurant, autrefois fréquenté par les anglais, c’est celui de Pierre Altobelli, un grand brun tout doit sorti d’un film de Visconti au parcours drôlement étoilé : Chez Bruno (Lorgues), Ducasse (Louis XV – Monte-Carlo), Maximin (Vence), Gagnaire (Paris), Yannick Alleno, Troisgros (Tokyo), Mandarin Oriental (Hong-Kong)…
« Je suis tombé dans la cuisine un peu par hasard. J’adorais manger et j’étais toujours curieux du menu. Mais j’étais aussi attiré par l’art contemporain. Finalement, la cuisine a été un moyen de m’exprimer par un autre biais, sans être exposé », nous confie le petit-fils de Davia.
Histoire plutôt rare dans une success story familiale : la mère de Pierre et de son frère, Alda, ne les a jamais poussés à devenir cuisiniers.
C’est Pierre qui a décidé, seul, de reprendre les rênes du bistrot après avoir fait ses armes au sein du prestigieux Intercontinental d’Osaka. La suite, on la connaît : après avoir fondé sa famille et réalisé qu’à Nice aussi, il y avait plein de « bons et beaux produits », Pierre revient au berceau, décidé à mettre en avant une cuisine réfléchie et saine, qui lui ressemble.
« J’ai d’abord gardé les plats français traditionnels de ma mère, puis j’ai intégré progressivement ma cuisine. L’objectif ? Attirer une clientèle de fins gourmets. »
Dès lors, niçois et étrangers du bout du monde viennent goûter à la cuisine du nouveau propriétaire. Succès qui n’est pas une fin en soi pour le chef, désireux d’accueillir des personnes « pas branchées » et qui aiment « juste » manger . « Le simple fait de revenir au restaurant, c’est déjà ça. »
À la carte, on retrouve les incontournables barbajuan crousti’frits à la farce potagère, les supions du pays fraîchement pêchés (San Remo), une coquine terrine de lapin à la sauge ainsi qu’une classique mais délicieuse sole Belle Meunière et autres réjouissances de saison.
Une ode à la Riviera, de Vintimille (où le chef a ses habitudes au marché) jusqu’à Nice, dans une version dépoussiérée, sublimée.
La constance et la qualité, voilà ce qui prime dans ce restaurant aux nappes vichy, sol en Terrazzo d’époque et dessins rétro signés Domergue.
« Je suis prêt à limiter le nombre de tables plutôt qu’à sacrifier la qualité du travail. »
Engagement que l’on retrouve dans l’assiette, puisque le cuisiner prépare encore artisanalement la farce des sardines, autrement dit – au mortier. Autre plaisir coupable : les artichauts à la Bottarga (notre béguin du jour), l’un des plats signatures de l’établissement et souvenir d’enfance du chef.
« Ma mère préparait souvent des artichauts farcis. Quand j’ai repris le restaurant, j’ai modifié progressivement la recette. Je les ai cuisinés de la manière dont j’aurais voulu les manger. Mais le plat n’est pas encore terminé. »
Et pour cause : pour cet amoureux de l’art, un plat, de la même manière qu’une musique, « est toujours voué à être épuré ».
Le Petit Plus : l’incroyable tarte aux pommes XXL, à l’allure de panettone. À ne louper sous aucun prétexte.
Par Louise Ballongue