Slava est une serial artiste, nourrie de traditions et de couleurs rétro. Sous ses coups habiles de pinceau, les devantures des vieilles enseignes niçoises reprennent vie. Rencontre avec une peintre-restauratrice au geste vif.
D’abord étudiante au sein de la très prestigieuse Royal Academy of Art de La Haye, Slava Jevcinova, élégante slovaque à la crinière brune, poursuit sa route créa’ en devenant « créatrice de caractères typographiques ». Un métier peu connu, mais qui lui ressemble – entier et atypique. Pourtant, elle s’interroge. Le contact avec la matière lui manque. Il suffira d’une seule visite à Nice – au milieu de ses ruelles sinueuses et chatoyantes où les enseignes aux robes feuilles d’or rivalisent d’histoires – pour avoir le déclic. Sublimer le patrimoine niçois et rénover les façades des commerces sera son hommage et combat. Sur bois, béton, tissus, ou résines, qu’importe la matière pourvu que la devanture l’inspire.
On distingue clairement une influence « rétro » dans vos réalisations, comment avez-vous trouvé votre style, votre identité ?
En l’occurence, niveau style, je dois surtout me plier aux envies et contraintes des clients. Bien entendu, si un projet ne me plaît pas ou ne me semble pas être en adéquation avec l’esthétique du lieu, j’essaye d’en parler avec le commerçant. Je cultive néanmoins une certaine affinité pour l’esthétisme du début du 20eme siècle qui me semble être le pinacle de bien des Arts… Mais nous sommes aussi au 21eme siècle et l’on peut imaginer une multitude de créations étonnantes…
On peut lire sur votre site que vous travaillez « à l’ancienne ». Qu’est-ce que cela implique ?
Chaque projet est peint à la main, sans utiliser d’autocollants, d’aérosols ni de lettres au pochoir.
« Cet art est traditionnel puisqu’il faut, à la manière des peintres en lettre du XIXème siècle, jongler avec de nombreuses polices de caractère mais aussi en créer a la demande ».
Est-ce difficile d’être une femme dans ce milieu ?
Personnellement, je n’aime pas être décrite comme une « femme peintre en lettres ». Je suis peintre en lettres et créatrice de caractères typographiques. Aujourd’hui, personne n’empêche une femme de prendre son échelle et ses pinceaux pour concevoir des enseignes… La plupart des hommes que j’ai rencontrés dans la profession ont toujours pris d’ailleurs de leur temps pour m’aider. Je pense qu’entre professionnels, on se concentre davantage sur le travail – qui est assez technique – plutôt que de se soucier des considérations métaphysiques des uns et des autres…
Vous avez réalisé la devanture de nombreuses belles enseignes locales (La Cordonnerie du Vieux Nice, Bricolités, Le Panier Gourmand, Edmond, Harrison, Fluffy Donuts …) sélectionnez-vous vos clients pour leur concept, leurs produits ?
Oui, bien sûr – surtout lorsqu’un client a passé des heures à maturer son projet. On fait alors tout pour réaliser son rêve…
Sublimer les commerces niçois et les personnes qui se cachent derrière, est-ce une fierté ?
C’est plus qu’une fierté, c’est une envie absolue de bien faire les choses…
« Combien de fois les habitants d’une rue, des touristes, vont passer devant la façade du commerçant qui m’a sollicité ? »
En parlant de fierté, quel est le projet qui vous a plus marqué ?
Difficile de n’en choisir qu’un seul, le Covid a retardé pas mal de gros projets avec des collectionneurs de voitures anciennes, des projets assez complexes… Donc nous verrons prochainement. La suite au prochain épisode !
Et celui qui a mal tourné ?
Je n’ai pas le souvenir d’un chantier qui ait vraiment mal tourné ! En revanche, il m’est déjà arrivé de sentir qu’un projet allait mal se passer et dans ce cas là je ne me lance pas (rires).
Quels sont vos futurs chantiers ?
Au risque de vous décevoir, je parle rarement d’un projet tant qu’il n’est pas terminé… Mais vous pouvez suivre mes aventures et les incroyables projets de mes clients sur Instagram !
Enfin, pouvez-vous nous citer quelques-unes de vos meilleures adresses niçoises ?
Avec plaisir ! Chez Palmyre, Trésors Publics, Fluffy Donuts, Don Vincenzo, La Cosina, Azzurro, La Rossettisserie, Comptoir du marché, Maison Pampille, Bricolités…
Par Louise Ballongue / Photos Enseignes Nice