Julien Silvestrini, alias "Silni", a choisi la customisation comme mode d’expression artistique. C’est en personnalisant des crampons qu’il s’est fait un nom dans le milieu du foot. Ce niçois passionné fourmille d’idées pour embellir baskets, sacs ou t-shirts et a même créé sa marque de lacets colorés : Sweetlaces.
Depuis toujours, Julien aime le dessin et la mode mais sa fibre artistique a été mise en sommeil un certain temps. Boulots alimentaires, manque de confiance en soi … et puis un jour, un déclic. Prenant conscience que le bonheur est en grande partie dû à l’épanouissement au travail, il décide de tenter une aventure, celle d’essayer de vivre de sa passion. Depuis ses premiers essais créatifs à son domicile jusqu’à l’actuel workshop de Saint-André de la Roche, son ascension a été fulgurante. Grâce à ses chaussures de foot relookées, le nom Silni est depuis 2018 bien connu des sportifs et du monde de la mode. On vient désormais le chercher pour plus de visibilité et pas seulement dans l’univers du ballon rond. Rencontre avec « un créateur kiffeur » aux rêves et projets plein la tête.
Parlez-nous de votre parcours. Vous êtes-vous formé dans une école d’art ?
Je suis un autodidacte. Petit, j’adorais le dessin, je m’amusais à customiser mon sac à dos pour l’école, ma manette de Play et j’ai participé à des ateliers créatifs à la Villa Thiole quand j’étais ado où un prof a parlé du talent que je possédais à ma mère. Hélas, une école d’art, c’était trop cher et puis, artiste ce n’était pas un métier pour mon entourage. J’ai commencé un apprentissage en carrosserie, puis en cuisine … puis des petits boulots sans conviction.
À quel moment avez-vous alors décidé de vous lancer, de reprendre le chemin de la création ?
À 30 ans, j’ai perdu un oncle que j’adorais et qui croyait en moi depuis toujours. Sa mort m’a fait comprendre que le temps était compté, qu’il fallait que je ne doute pas de mes capacités et que j’aille vers ce qui m’était destiné pour être heureux. C’est en parlant avec une amie de customisation de sneakers que j’ai décidé de relever ce défi. J’ai fait une formation chez le designer Julien Custom à Toulouse, j’ai acheté du matériel et j’ai commencé à créer à la maison.
C’est l’idée de customiser des crampons qui a tout déclenché. J’ai pu rencontrer le footballer sénégalais Salif Sané et mon travail sur ses chaussures m’a valu un article dans L’Ēquipe qui les a repérées pendant le mondial 2018.
Comment les choses se sont ensuite enchaînées ?
Par la suite, j’ai personnalisé les crampons d’autres joueurs et j’ai été contacté par Puma. Là, j’ai réalisé que ce projet de collaboration avec la marque m’ouvrait une voie inespérée et j’ai monté ma société Silni Art. C’est ainsi que j’ai participé à la création de la Puma King pour Neymar, personnalisé les gants et les crampons du gardien de but Jan Oblack, réalisé une paire pour Griezmann …
Comment êtes-vous arrivé à la customisation de maroquinerie ?
Ce projet me tenait à cœur et j’ai donc rencontré le directeur de la boutique Louis Vuiton à Nice. Le siège a aimé mes idées et j’ai entamé une collaboration avec la marque. J’ai été invité lors d’évènements qu’elle organisait pour réaliser des performances graphiques sur par exemple des étiquettes en cuir pour bagages à offrir aux clients et par la suite, j’ai continué à travailler avec le groupe pour d’autres créations
Quelles sont les commandes spécifiques que vous recevez aujourd’hui de certains de vos clients ?
Mon réseau s’étant beaucoup agrandi, je reçois des demandes de pièces uniques. Je dirais non sans fierté que ce sont des pièces d’art que je peux vendre. Par exemple, et ceci est en dehors de ma collaboration avec Vuiton, le client achète une paire de baskets ou un sac de cette maison et je les personnalise selon ses envies.
En personnalisant une collection de Jordan 1, Silni a teint les lacets en dégradé de couleurs et eut l’idée de créer Sweetlaces, « la marque de lacets qui sublime tes sneakers ».
Pouvez-vous nous parler de la création de votre marque Sweetlaces ?
En 2022, j’ai voulu rendre accessible mon travail au plus grand nombre en proposant des lacets abordables et casser l’image d’inaccessibilité inhérente au monde du luxe. J’ai composé une collection de 65 coloris de dégradés évoqués par des noms gourmands, fun, enfantins comme Chococo, Pistacchio ou Barbappa. Je propose également des t-shirts, des stickers ou des bandanas.
Avec Silni, soyez bientôt prêts à rentrer dans un univers, celui de la worklife.
Workshop, workbrand, workzone … pourquoi le mot travail compte-t-il autant pour vous ?
Tout d’abord parce que vivre de mon travail de créateur, de ma passion a tout changé pour moi. J’en suis fier, je peux nourrir ma famille et je déborde de projets. En 2023, j’ai emménagé avec mon équipe dont ma femme Marie dans un grand workshop où je peux créer, stocker mes produits et installer un studio de photos pour les shooter mais qui sera aussi à louer pour d’autres artistes et créateurs. Le travail nous permet de nous élever, de changer sa vie. Et ce qui est fantastique, c’est que travailler désormais signifie kiffer !
Quel est donc ce nouveau projet Workbrand ?
J’ai toujours voulu dessiner des vêtements mais je m’intéresse aussi par exemple au mobilier. L’idée pour l’instant est de créer une collection par métier, de décliner des vêtements et des accessoires dans un thème et pour un style précis pour développer une marque fashion. J’imagine une salopette, une sacoche, un chevalet de peintre, une palette, mettre en avant les métiers ouvriers, de l’art, du sport …
Travailleur fou nous l’avons compris mais quels sont vos endroits préférés à Nice pour passer une soirée gourmande et détendue ?
Depuis peu, nous allons avec ma femme et des amis à Panisse qui vient d’ouvrir, L’Uzine est toujours une valeur sûre et en bon niçois, j’aime beaucoup Lou Pantail d’ailleurs fief de nombreux footballers.
Propos recueillis par Anne Emellina / Photos Silni Art