Le Centre des monuments nationaux a invité l’artiste Hubert le Gall à investir la Villa Kérylos. Ce dernier a ainsi donné naissance à des créations inspirées de la mythologie grecque en adéquation avec le lieu : rencontre amoureuse autour de la Grèce.
Sculpteur et designer, Hubert le Gall métamorphose nos univers en réalisant des meubles poétiques et plein d’humour. Outre son travail de plasticien, il est scénographe pour les plus grands musées de France et d’Europe qui font appel à lui pour donner une dimension narrative à leurs expositions. Connaissant son amour pour la Grèce et ses grandes connaissances historiques, la Villa Kérylos lui a alors proposé d’être un écrin pour une grande aventure artistique, un regard nouveau sur la « fantaisie grecque » de Théodore Reynac, fondateur de la villa. L’artiste qui avoue une inclination secrète pour l’Antiquité a développé ce projet avec Bérénice Geoffroy-Schneiter, historienne de l’art et a crée une quarantaine de sculptures et pièces de mobilier spécialement pour l’occasion.
Au gré d’un parcours narratif, les créations s’intègrent au décor de la villa et se déclinent en thématiques. On y découvre les héros de l’Antiquité, Ulysse, Pénélope, les Sirènes, Dionysos, Apollon, Thésée, Achille … Ainsi, dans le jardin le buste Aphrodite aux deux visages d’où jaillissent des anémones illustre la beauté fécondante. Dans le vestibule d’entrée le visiteur est accueilli un grand dais brodé par la Maison Lesage-Intérieurs intitulé Alcyon, oiseau de jour, oiseau de nuit. Kérylos signifie alcyon ou hirondelle de mer, oiseau mythologique qui ici déploie ses immenses ailes bleues nuit et regarde le ciel, intermédiaire entre les humains et les dieux, de ses prunelles de verre. Les plumes de l’installation Le Murmure des âmes disposées poétiquement au-dessus d’une vasque des thermes représentent l’oiseau mais aussi les âmes de la maison.
Dans le patio permettant d’accéder aux pièces de la villa, des sculptures en bronze réinterprètent des épisodes de la mythologie comme ce vase où les sirènes qui ensorcelèrent Ulysse et ses compagnons sont illustrées par des roses épineuses (Le Chant des Sirènes) ou ce banc (La Ruse d’Ulysse) représentant un des moutons qui permit la fuite de la grotte du Cyclope. Dans la bibliothèque, les deux livres l’Iliade et l’Odyssée sont coulés dans le bronze et surmontés de mobiles aériens symbolisant leur portée dans l’éternité. Dans la salle à manger, Le Festin des dieux aux sphères multicolores évoquent l’ivresse et Dionysos.
Dans le grand salon, il faut remarquer le motif central de la mosaïque dédiée à Thésée et au Minotaure qu’Hubert le Gall a imaginé en meuble cabinet Taureau. La banquette « vache » Pasiphaé rappelle avec humour le stratagème de Dédale qui permit l’union du taureau blanc et de cette reine qui donna naissance au Minotaure. Parmi les « meubles animaux », notons encore le secrétaire Pégase au corps de cheval et le bureau Virgile épousant la silhouette d’une chèvre broutant qui symbolise la veine bucolique de toute la littérature gréco-romaine.
Pour l’artiste, « le narratif reste le meilleur support pour parvenir à la forme. Seule l’histoire qu’un objet raconte m’intéresse. ». Pour évoquer la femme fatale et la séduction, il a créé le miroir L’Oeil de Méduse qui célèbre la beauté ambigüe de la Gorgone dangereuse et qui se trouve dans la salle de bain de Mme Reynac ou encore L’Aphrodite des jardins, buste de la déesse du désir et de la beauté symbolisés par une multitude de seins.
Les fantaisies artistiques d’Hubert le Gall donnent à voir la Villa Kérylos sous un jour nouveau où l’art poétique et onirique côtoie la sublime architecture du lieu.
Le Petit Plus : Cette exposition fera l’objet d’une publication aux Editions du patrimoine dans la collection « Le journal des expositions » et d’un catalogue aux éditions In Fine éditions d’art.
Par Anne Emellina